La vie n'est pas un roman (Claude Jaunière)

Extrait :
Le nez délicat de Valérie Armangaud se plissa imperceptiblement en voyant Stéphanie se jeter sur le canapé, ramener ses pieds sous elle, sans respect pour le velours pastel que ses chaussures labouraient. Pourtant, elle continua de sourire, tandis que la jeune fille poursuivait avec sa véhémence coutumière :
— Tu comprends, Grano, cela ne peut pas durer !
— Quoi donc, mon chéri ?
— Oh ! Tu ne m'as pas écoutée. Comme tu es distraite ! Ou plutôt, tu ne t'intéresses pas à moi. Il y avait, dans le ton, une sorte de détresse qui émut Valérie. Elle se leva, pour rejoindre sa petite-fille qui se débattait sauvagement pour échapper à l'étreinte des bras qui tentaient de l'enlacer.
— Calme-toi ! Qu'est-ce que c'est que cette histoire ? Ma parole, tu me fais une scène !
— Laisse-moi ! Tu es bien comme les autres ! Nous, les jeunes, nous ne comptons que pour recevoir vos critiques.
Le sourire de Valérie s'accentua, tandis qu'elle répliquait sur le même ton de douceur :
— Les critiques ? Il me semble que vous, les jeunes, vous nous en accablez aussi, avec une cruauté dont j'espère que vous ne vous rendez pas toujours compte. N'entamons pas de discussion : qu'est-ce qui « ne peut pas durer », au point qu'il te faille arriver chez moi, sans prévenir ?…