Extrait : La clé tourna dans la serrure, la porte s'ouvrit en grinçant, comme toujours. Anouk se glissa à bas de son lit, passa ses pieds dans des espadrilles usagées qui faisaient office de mules, s'enveloppa dans un vieux manteau promu au rang de robe de chambre. Elyane était dans la petite salle à manger, promenant un regard vague sur la table servie…
Extrait : Sans cesser de dérouler la bande qui retenait le pansement autour du bras du blessé, Martine Renaud rentra un peu, d'un geste instinctif, la tête entre les épaules. Elle n'avait pas vraiment peur, mais ce bruit de bombardement, pourtant assez lointain, éprouvait beaucoup ses nerfs. Le blessé, un grand garçon roux, le visage semé de taches de son, fronça son nez de gosse et se mit à rire…
Extrait : Ceux qui s'imaginent que les journalistes sont des gens d'aspect bizarre auraient trouvé en Marie Renal, journaliste professionnelle depuis une dizaine d'années déjà, un démenti formel à cette idée préconçue : elle était petite, menue, d'allure discrète et de comportement timide. Son talent consistait en un sens aigu de l'observation et en une inaltérable patience…
Extrait : Douarnenez n'avait, semblait-il, jamais été si gracieux, ni si pittoresque qu'en cette fin de belle journée. Une par une, les barques aux voiles brunâtres ou grises rentraient au port, gagnant, par une habile manœuvre, leur place le long du quai, près des gros thoniers, qui préparaient l'appareillage du lendemain sous l'oeil paterne des douaniers…
Extrait : — Tu vas encore me laisser toute seule, mon papa ? Dis, ne sors pas ! — Il le faut, Colette. — Mais pourquoi, puisque tu n'as pas de travail ? Tu es déjà sorti ce matin pour en chercher. Reste avec moi ! — Et ta lettre au Père Noël ? C'est aujourd'hui le dernier jour, tu sais ! Le visage de la petite fille s'éclaira d'un sourire radieux…
Extrait : « Propriétaire grand cirque, recherche matou de race royale, dit « Padisha ». Prix indifférent. Ecrire au journal, N° 3-5-44. » Le hasard venait de mettre cette annonce sous mes yeux et, machinalement, je passai la main en caresse sur la fourrure de Puck, mon royal Padisha, endormi sur mes genoux. Un ronronnement sonore m'avertit que Puck se montrait sensible à mon attention…
Extrait : C'était au temps où, dans le voluptueux Orient, les femmes restaient rigoureusement voilées et vivaient claustrées au fond des harems où les gardait la folie jalouse de leur seigneur et maître. Plaisante folie, en vérité, et qui étonne un peu de la sagesse arabe. Qui donc peut mettre l'amour en cage, quand les grenadiers sont en fleurs…
Extrait : Les deux chantres massacraient le « Dies irae » avec autant de sérénité que d'indifférence. Ils l'avaient attaqué un ton et demi trop haut, à contre-temps. Malgré les efforts désespérés de l'harmonium pour « rattraper » les défaillances, les voix tonitruaient paisiblement. Pour gagner du temps, les hommes passaient une strophe sur deux. On ne pouvait s'en plaindre !…
Extrait : Un matin éclatant d'été. Des nuages d'un blanc laiteux traçant des îlots aux dessins capricieux sur l'immense plafond céleste. Une eau attirante qui miroite. Une barque qui se balance mollement. Deux jeunes gens en costume de bain y ont pris place. Elle est blonde, avec des cheveux ondés épandus sur les épaules. Elle est aussi jolie que le paysage qui lui sert de cadre…
Extrait : Sans cesser de dérouler la bande qui retenait le pansement autour du bras du blessé, Martine Renaud rentra un peu, d'un geste instinctif, la tête entre les épaules. Elle n'avait pas vraiment peur, mais ce bruit de bombardement, pourtant assez lointain, éprouvait beaucoup ses nerfs. Le blessé, un grand garçon roux, le visage semé de taches de son, fronça son nez de gosse et se mit à rire…
Extrait : — Le tourbillon est magnifique ! Je ne connais pas une étoile au monde capable de le faire durer aussi longtemps ! Enthousiasmé, Simon Bernac en lâcha son long fume-cigarette d'ambre qui faillit se briser sur le parquet luisant. — N'est-ce pas, mon cher maître ?… Véra Milikova tapotait ses cheveux avec un détachement feint…
Extrait : — Mon Dieu, que les hommes sont bêtes ! soupira Isabelle d'Andrieu en rejetant au fond du coffret d'où, tout à l'heure elle les avait extraites, les lettres d'amour qu'entre bien d'autres, elle s'était plu à garder, parce que celles-ci lui semblaient les plus significatives. Parfois, lorsqu'elle s'ennuyait, comme aujourd'hui, elle les tirait de l'oubli pour les parcourir…
Extrait : Le ciel s'était tout à coup assombri ; les passants hâtaient le pas. Mme de Mézieux leva la tête, consulta du regard la voûte céleste et, rassurée, continua son chemin. Ces pâles rayons de soleil, qui arrivaient à percer les nuages, lui inspiraient confiance. Mais ce n'était qu'une malice du ciel. De larges gouttes commencèrent à tomber. Mme de Mézieux marcha plus vite. …
Extrait : Depuis ce jour, les Poirier se multiplièrent abondamment et se répandirent dans le monde, chargés par le Créateur de représenter l'ordre, la respectabilité, le mépris des choses de l'esprit et l'amour de l'argent qui sont les bases de toute société durable. S'ils ne firent jamais grand bruit, ils firent toujours d'utile besogne…
Extrait : C'était la fin d'un bel après-midi de juillet, particulièrement chaud et le soleil qui dorait les crêtes des montagnes et s'étendait sur les collines, déversant son flot de lumière à travers les plaines et les vallons, rougissait insensiblement du côté de Taos, prenant des reflets cuivrés et or, puis virant brutalement au rouge, embrasait la montagne et les prairies environnantes…
Extrait : Le choc se produisit, brutal, inattendu, terrible. Un bruit indescriptible de ferraille, de bois suivit à quelques secondes celui de la vapeur renversée. La lourde locomotive du rapide venait de chevaucher un train pris en écharpe qui se garait sur une voie secondaire. Un silence de mort succéda, oh ! de si peu de temps, au bruit de l'effroyable catastrophe. …
Extrait : Elle les avait cueillis brin à brin dans la partie du bois où le muguet est le plus odorant. S'appeler Aurore, Aurore Bocage, avoir dix-huit ans et tenir dans sa main une grosse botte de clochettes blanches ce jour de 1er mai, n'est-ce pas ajouter à la nature une poésie de plus, instinctivement, sans le savoir ?…
Extrait : Ce dimanche-là, dans le port de Paimpol, un prêtre en surplis bénissait les grands trois-mâts et les goélettes qui venaient d'appareiller pour la dure campagne des pêches d'Islande. Sur le quai, la foule des coiffes blanches des mères, des femmes ou des fiancées, les enfants et les vieux suivaient la coutumière cérémonie avec un recueillement grave…
Extrait : Depuis huit jours, maître Dargent, le jeune avocat d'Assises et le président, ainsi que l'avocat général qui auraient, le mercredi 12 avril, à connaître les faits de ce qu'on appelait dans la presse, le "Crime de la Zone", étaient assaillis de demandes de cartes pour assister au procès prévu pour trois audiences, de celle qu'on appelait la belle Solange. …
Extrait : Il subsiste encore, dans Paris, au sein même de la vie turbulente et fiévreuse, quelques quartiers aristocratiques qui conservent toujours leur physionomie d'antan. Plus que toute autre, l'avenue Henri-Martin, qui s'allonge entre le Trocadéro et le Bois de Boulogne, a su résister à la pression formidable de modernisme intense que la capitale a subi depuis une dizaine d'années. …
Extrait : Le rapide de Paris entra dans la gare de Romilly avec un bruit d'enfer. Soufflant, haletant, il s'immobilisa comme à regret. Sur le quai, un homme d'une cinquantaine d'années guettait anxieusement les voyageurs qui descendaient. Tout à coup, il poussa un cri de joie et se précipita vers un jeune homme élégant qui venait de quitter un wagon de première classe. …
Extrait : Gaston Chaligny entra dans le petit restaurant où il venait dîner presque tous les soirs et se dirigea sans hésiter vers une petite table où deux couverts étaient disposés. Il s'assit à l'une des deux places, déplia sa serviette, regarda l'heure et prit son journal. Mais il lisait depuis cinq minutes à peine que la porte s'ouvrit de nouveau, un autre jeune homme entra…
Extrait : La neige poudrait Paris de ses flocons légers, habillait cette nuit de Noël de son traditionnel manteau blanc. L'élégant hôtel que M. Bernard Loisel habitait avenue du Bois étincelait de mille lumières, une grande réception s'y donnait pour célébrer le réveillon. Tout n'était que joie dans la maison fastueuse dont l'éclat des lustres rehaussait encore le luxe…
